Du sang et des larmes

Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, de la peine, des larmes et de la sueur. –Winston Churchill, 13 mai 1940, Chambres des communes. Messieurs les managers, les chefs, les dirigeants, les entrepreneurs, les patrons, vous qui êtes “aux responsabilités”, je ne trouverai pas meilleure formule.

En effet, en me basant sur cette formule très très connue, je promets souvent aux dirigeants qui me sollicitent “des larmes et de la sueur”. A ceux qui ne connaissent ni larmes ni sueurs j’indique qu’il y a un problème. A la question c’est quoi un dirigeant agile ? c’est quoi un manager agile ? Nous pourrions répondre : c’est la fin d’une croyance qui veut que le dirigeant, manager, soit servi par ses équipes. il doit servir ses équipes. La fin de la croyance que le management est une science dure, c’est une science molle.

En quoi cela se matérialise-t-il ?

Vous devriez arrêter de croire que la gestion de vos équipes peut se réduire à la gestion d’une feuille excel, à un tableau de nombres. Comptabiliser, additionner, soustraire, ajouter des nombres est illusoire. On ne remplace pas deux par deux, on ne remplace pas un nom par un autre nom, une activité de 100 divisée en 4 ne donne pas 4x25. Toute ceci c’est se mentir. D’ailleurs personne n’est dupe. Mais c’est tellement confortable, tellement simple.

Arrêtons cette illusion, ce mensonge.

Votre matière est humaine. Elle est donc complexe. Elle ne peut se réduire à des algorithmes. Elle est en constante évolution avec son environnement. Elle ne sera jamais stable. Votre rôle est d’être à son service, et non pas l’inverse. Votre objectif est probablement de lui assurer la meilleure performance, productivité, pour cela, comme un numéro de tourneur d’assiettes, vous ne cesserez de vous occuper d’eux, d’où le sang et les larmes.

On ne peut penser envisager changer 10 français par 30 personnes en offshore. Ces nombres ne s’additionnent pas (je ne peux donc pas vous dire pourquoi cela ne fonctionne pas). On ne peut pas transformer un expert payé 2000 par deux juniors payés 500 (je ne dis pas que l’un est mieux que l’autre, je dis que cela est différent). Ces chiffres ne sont pas de vrais chiffres. Les indicateurs que vous devriez manipuler sont immatériels, malheureusement pour nous tous, cela demande des efforts.

Un dirigeant agile, un manager agile, n’a pas vraiment de zone de confort (d’où le sang et les larmes).

Pistes

Est-ce que 25% de votre activité dédiée à la conversation avec vos équipes vous paraît trop ? pourtant cela me paraît indispensable au maintient de ce liant.

Si vous estimez ne pas être utile, réellement, admettez le et trouver une autre façon de contribuer à l’émancipation de votre activité. Ce n’est pas forcément facile à admettre mais cela sera très gratifiant.

Dans votre boulot de tous les jours, allez sur le terrain (le gemba du Lean), c’est eux qui savent répondre à de nombreuses questions. On notera aujourd’hui comme l’a justement souligné Marc Halevy lors d’un récent congrès auquel j’ai pu participer : l’ouvrier est là depuis et pour plus longtemps que son petit chef, lui même est là depuis et pour plus longtemps que son chef, lui même est là depuis et pour plus longtemps que son patron, lui même étant là depuis et pour plus longtemps que son actionnaire. Pour la pérénnité de l’entreprise les décisions prisent par la base sont souvent les bonnes si tant est que la base souhaite l’émancipation de l’entreprise.

La base, le faiseur, l’opérateur, doit donc souhaiter l’émancipation de l’entreprise. Oui cela aussi c’est votre job.

Et ce job est passionnant : constamment assurer le bien-être du système, donc les larmes et la sueur au début, la joie, le plaisir ensuite.